Fontaine-l’Evêque : le château Bivort, véritable emblème de la Ville
« Abritant actuellement les locaux de l’administration communale, le château Bivort est devenu au fil des siècles un élément indissociable de la Ville, ainsi qu’un véritable point de repère géographique pour les fontainois, très attachés à cet édifice à l’architecture stylisée. »
Lorraine Demoulin, Présidente du Centre-Culturel de Fontaine-l’Evêque, historienne de formation et guide passionnée, nous raconte l’histoire de cette charmante bâtisse agrémentée de quelques sympathiques anecdotes.
Une histoire mouvementée du Moyen âge à nos jours
Situé sur un promontoire rocheux, sa construction en dur daterait probablement du 13ème siècle par Nicolas de Fontaine, évêque de Cambrai. Le plan de cet ancien château féodal avec ses 7 tours et sa forme quadrilatère daterait aussi de cette période. Comme bon nombre d’édifices, il n’a pas été épargné par les conflits comme la lutte entre François Ier et Charles Quint, le siège de Charleroi, la révolution belge et les deux guerres mondiales. « C’est plus exactement trente-et-un seigneurs et leurs épouses qui ont régné sur Fontaine. Vers 1672-1678, l’édifice est racheté par Michel Luc Camille de Rodoan qui va s’atteler à la construction du portail et de la façade. C’est à partir de ce moment-là que l’édifice va prendre sa forme actuelle. C’est Clément Bivort de La Saudée qui va lui rendre ses lettres de noblesse en 1864. Sans oublier les interventions des architectes Auguste Cador en 1869 et Simon Brigode en 1954 lui conférant toujours actuellement un esprit néo-médiéval. »
Encore appelé seigneurie de Fontaine, le château Bivort transpire d’une ambiance légère avec son escalier Louis XV en bois dont la rampe est ornée d’un lion couché tenant dans ses griffes les armes de la famille des Rodoan. Au mur, on aperçoit des figures en forme de médaillons réalisées par les frères Moretti, célèbres stucateurs italiens du 18ème siècle. Elles représentent des poètes et philosophes antiques. « À la montée des marches, on s’imaginerait presque dans un film de Sofia Coppola avec costumes d’époques, buffets gargantuesques et jeux de la Cour ;-) Les deux salons bleu et rose du rez-de-chaussée valent définitivement le coup d’œil ! Dans le salon rose, on retrouve encore des stucs de 1780 des Moretti. Ils évoquent des activités saisonnières et artistiques. Ce qui est assez particulier c’est qu’ils signaient très rarement leurs œuvres, et là on distingue très clairement leur signature. Le salon bleu s’orne, quant à lui, de feuillages et de fleurs entrelacés gracieusement qui restent dans le style très 18ème du château. »
On trouve aussi dans ce salon bleu des œuvres d’artistes fontainois. Deux de celles-ci sont très particulières : Le « David nu » de l’artiste Alex Louis Martin où l’on observe un homme nu et émasculé avec un casque allemand. Cela représenterait l’Allemagne déchue en 1918. Autre œuvre singulière : une reproduction photographique illustrant le combat de Fontaine entre les armées républicaines françaises et les armées hollandaises-autrichiennes en mai 1794.
Des trésors insoupçonnés
Remontant au 13ème siècle, la chapelle Saint-Jean-Baptiste fait intrinsèquement partie des trésors du château. Cette dernière participait au circuit défensif de l’enceinte du château. Pendant la restauration du château en 1672, la façade primitive, devenue trop vétuste, fut reconstruite en conservant son cachet de style baroque Louis XV avec les meneaux aux fenêtres toujours visibles. « Cette dernière est décorée de guirlandes et de deux chimères enroulées portant les armes des Rodoan. Un soleil doré et un petit campanile trônent au-dessus du toit. Deux plaques commémoratives sont appliquées sur la façade. À la fin du 18ème siècle, la chapelle est désacralisée et transformée en salle de bal avec un cloisonnement du chœur. Par la suite, une cheminée est installée et ornée des blasons des seigneurs de Fontaine et ceux des familles alliées. La chapelle fut rendue au culte en 1872. Comme l’église Saint-Christophe n’est plus praticable pour l’instant, c’est au sein de cette ancienne chapelle castrale que l’on fait des offices. Pour la petite anecdote, on a retrouvé en 1975 un faire-part de mariage mentionnant que la cérémonie nuptiale aurait lieu à la chapelle Sixtine du château de Fontaine-l’Evêque… Cela vous donne idée du chauvinisme fontainois ;-) »
Au premier étage, au sein du cabinet de la directrice générale, se trouve une vieille carte cachée de Fontaine peinte au plafond avec des médaillons représentant les douze signes du zodiaque, ainsi qu’une tour dite Bourienne. « Nous ne sommes pas peu fiers, en tant que fontainois, de cette fresque zodiacale car c’est bien plus souvent le préambule à la représentation du ciel… Cependant, on y découvre une carte terrestre centrée sur le château de Fontaine-l’Evêque. C’est vraiment unique en Belgique, voire en Europe, pour ce qui est de la décoration des châteaux. C’est d’autant plus incongru qu’une carte terrestre se met au mur, voire au sol, mais pas au ciel. Pour la petite histoire, c’est une demande de Clément Bivort à son architecte Auguste Cador qui souhaitait que les concessions minières sur lesquelles il avait une certaine autorité soient représentées sur cette carte. »
En pratique, le château se visite lors des journées du patrimoine en septembre, ou dernièrement lors du 1er mai pour l’événement la « Vie de Château en famille ». « Pour cette 2ième édition, plus de 200 personnes ont franchi les portes du château. On ne s’attendait vraiment pas à un tel succès ! Les gens étaient ravis de pouvoir écouter l’histoire du Domaine, d’explorer ses pièces et objets phares… On a même rencontré deux descendants de Clément Bivort de la Saudée :-) Vous savez, c’est un château qui vit car le personnel de la Ville y travaille, et puis l’on s’y marie ! Cela fait toujours son effet sur une invitation de mariage car c’est un lieu enchanteur qui met tout le monde d’accord… Projetez-vous un instant… C’est le grand jour… Vous approchez du château dont vous apercevez déjà les majestueuses tours au loin… Bon ok, vous l’aurez compris, je suis fontainoise et un peu chauvine aussi ;-) »